Paradis perdu…et retrouvé
"Le Seigneur Dieu planta un jardin en Eden, à l'Orient et il y plaça l'homme qu'il avait créé. Il prit l'homme et rétablit dans le jardin d'Eden pour cultiver le sol et le garder" (livre de la genèse, I, 15).
C'est au moment où l'ange du Seigneur chasse Adam et Eve du jardin, que ce lieu devient pour eux le paradis, le paradis perdu ! C'est alors qu'ils se rendent compte que le jardin était beau et qu'il y faisait bon y vivre. La perte du paradis marque mythiquement la naissance de l'Humanité avec sa beauté et sa noirceur et c'est sa quête qui fait l'Homme ! 

Depuis, la descendance innombrable d'Adam et d'Eve dont nous sommes, n'a eu de cesse de retrouver le Paradis perdu, de le retrouver sur terre, durant sa vie et aussi de le retrouver après sa mort, encouragée par les religions monothéistes.

Comment retrouver ce paradis ? En explorant la terre, en explorant l'univers, en explorant son cœur ?

Les explorateurs sont partis à sa recherche, ils ont trouvé des lieux merveilleux, une nature vierge pouvant faire croire au paradis. Marco Polo est allé jusqu'en chine, les conquistadors ont trouvé l'Eldorado, mais s'en sont emparés par la force, convertissant la Beauté en valeur marchande… 

et le Paradis est devenu l'enfer !

L'enfer, c'est-à-dire, l'absence de beauté, l'absence de joie et d'amour.

Les artistes ont aussi essayé et ils y sont partiellement parvenus. Par leur création, ils ont trouvé des espaces où l'âme, sinon le corps, s'échappe, un espace où l'imaginaire dissimule le mal et la mort, où la mort est anéantie par l'esprit.

Les artistes des civilisations précolombiennes ont inventé l'art plumaire ; les coiffures au plumage fictif, pris ou donné par les oiseaux messagers des dieux, sont une manière de franchir le mur invisible qui sépare le terrestre et le monde abandonné par Adam. La nature, déjà présente avant l'Homme dans le jardin d'Eden, guide l'artiste sur le chemin des retrouvailles.

Et dans notre vieille Europe, au sein d'un monde catholique où se cache tant de beauté, à l'ombre de leur cellule, dans leurs moutiers silencieux, des femmes recluses créent des petits paradis faits de fleurs, de débris de verre, de papier doré ; jardins clos à l'image de leur cœur et qui devient l'espace privilégié où elles retrouvent Dieu ; leur paradis n'est plus dans l'au-delà, mais au plus profond d'elles-mêmes. Ces mêmes femmes reconstituent dans des boîtes leurs très modestes univers quotidien ou bien, elles entourent dans des cadres quelques reliques de mousse et d'éclats de nacre tirés de coquillages. Par ces créations anonymes et toutes simples que l'on peut qualifier d'art brut, elles ne sont pas loin d'approcher ce lieu "où il n'y a plus ni pleurs ni grincements de dents".

Bernadette Berthod, Docteur en Lettres. Conservateur du musée d'art religieux de Fourvière.

Françoise Souchaud présente
"Explorateurs et Jardins perdus"
du 19 octobre au 12 novembre 2017

Les Galeries de la Tour
16, rue du Bœuf 69005 Lyon

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